
Hein ?!
Bon, alors forcement, Clarence me mettant au défi de trouver encore une de ces excuses bidons dont j’ai la spécialité, juste pour ne pas jouer à son putain de jeu de « trouve 3 super méchants de la mort qui tue », ça m’agace.
Ouais, j’ai grave autre chose à foutre, mais il m’a défié comme un Massaï te plante la lance à un centimètre des orteils en te postillonnant dessus du regard, alors je me sens obligé.
[bande -son de début de post]
Donc, si je ne réponds pas à vos mails, ça sera la faute à Clarence. J’adore les boucs émissaires.
D’autant plus que réfléchissant au problème, je remarque plusieurs trucs :
J’ai beau regarder et avoir vu un sacre pacson de films en tous genres, j’ai pas retenu grand-chose.
Je suis plutôt du genre qui pense soudain à un film dans une situation et imagine que tout le monde l’a vu (« mais si, le film néerlandais de Joris Ivens, cette ode sépia où le rôle principal est tenu par le vent, agressif, oppressant… »), mais pas trop celui, extra casse-couilles, qui pour meubler un blanc, te raconte pour la dixième fois la scène de fin d’Usual Suspect, genre :
« Ah! La fin, elle tue trop, surtout le moment où…Mais tu l’as pas vu, non ? Faut pas que je te raconte ! Tu verras, Kaizer Sauze, trop la surprise, en fait…Tu me diras, moi j’avais un doute parce que…On peut capter un peu dans une scène où il prend un……… »
TA GUEULE, merde !
Donc, moi je me rappelle en situation, mais pas trop si j’essaye d’y penser. Alors les méchants….mmmh….???
En plus de ne pas avoir de mémoire, et malgré une enfance à lire des Tintins pleins de méchants irrécupérables (et imbéciles), je suis rarement frappé par le fait que le méchant est définitivement une crapule atroce.
C’est plutôt une vision opportuniste qui prime...Dark Vador, méchant ? Franchement, euh…Flippant, OK, mais c’est juste le produit d’une histoire, qui cherche à arriver au but qu’il s’est fixé.

Donc, je serais plus souvent choqué par une situation de méchanceté pure que par un personnage qui s’échine à l’être.
Maintenant que mon sermon de jésuite est fini, effacez tout et appréhendons le rôle du méchant dans le cinéma asiatique….
*Numéro 1 : Les méchants dans les films de la Shaw Brothers.
Je dirais un jour personnellement merci à Chacha (dont le blog lui-même suinte d’une certaine méchanceté) de m’avoir fait voir ce que je pense être mon premier Shaw, une affligeante histoire de frères manchots affublés de perruques à nattes blanches (les perruques, pas juste les nattes…n’est pas le copain de Barbie qui veut) et très probablement d’une vengeance…Que sais-je ?
Toujours est-il que s’il y a des méchants sur terre, ils ont été concentrés dans le cinéma hongkongais, avec une barbarie sans grand pareil.

Suivant la règle « si ce n’est toi, c’est donc ton frère », ils se ressemblent plus ou moins, avec parfois des morceaux de bravoure comme ce couple de putain de sadiques de vos mères dans « The Crippled Avengers » , un film qui envoie de la travée de chemin de fer mieux que les FFI et Tarnac réunis.
On y trouve les 2 méchants récurrents :
*soit c’était le dégoûtant seigneur local, fourbe et corrompu, rompu à toutes les traîtrises, et le fier-à-bras écervelé,
*soit c’était la même chose, version héros au service du mal de père en fils. Lequel est ici affublé de bras de fer qu’il a aussi dur que mon muge au réveil, de quoi couper de la jambe et du bras, en tout cas.

Electric boogie !
Et puis heureusement, parce que sans ça, le titre ne marcherait pas. On admirera que dans le cinéma HK, on puisse généralement rire de tout ce dont on ne rit pas ouvertement ailleurs : un estropié ? Mort de rire ! Un débile ! ROFL !
C’est là qu’on remarque, après 1h40, quand tout le monde est mort ou presque, que ce film est une perle : contrairement à tous ces films kleenex mentholés (agréables mais jetables), étalant leurs histoires de vengeances, honneurs bafoués, vendetta, oppressions vs opprimés, etc., dans celui-ci, il n’y a RIEN ou presque qui explique la méchanceté imbécile des bougres, sinon leur bêtise.
Ici, on en a une ébauche (le vieux a vu sa femme coupée en deux dans les premières minutes, et son fils amputé, alors ils se vengent sur tout et n’importe qui, mais pas n’importe comment, puisqu’ils font pareil).
Ils sont désormais méchants par principe, par plaisir, passe-temps, parce qu’il faut bien que quelqu’un se dévoue, alors tant qu’à faire, autant y être prédisposé (la preuve=ils ont le pouvoir…heureusement que le Grand Timonier arrivera bientôt).

[La partie de carte, version pekinoise ]
Plus de rouges ? Qu’as cela ne tienne, Anne mène !
Donc, on peut dire qu’ils sont à peu près les exemples les plus aboutis de ce que peut donner un méchant de la Shaw .
[bande son du tiers de post]
En gros, il n’écoute rien, se bat le jonc de qui il castagne et a oublie pourquoi, ne fait que ce qui lui plaît, a déjà le pouvoir ou l’obtiendra dans le sang, élimine tout le monde pour le fun, par couardise (il fait alors tuer les autres, encore plus classe) ou par tradition.
Bref, il est désespérément libre, un sale gosse de merde, mais avant l’invention des BMW blanches et du mesurage de bite, donc il a choisi la crapulerie ultime pour s’affirmer. Convaincant.*

Fallait pas faire chat-bite au héros.
Portent le fanion dans l’équipe : Le baron Vladimir Harkonnen, tellement classe dans le film comme dans les livres….ah, instant magique où la ventouse cardiaque du jeune esclave décapsulé laisse s’écouler des litres de sang chaud, son regard de truite vidée (ou de Ben Affleck, c’est selon) rencontrant celui, pétillant et lubrique, du baron qui fure son dernier souffle.

Un p’tit bisous ?
*Numéro 2 : La Nuit du Chasseur
Le méchant vraiment intelligent, qui fait rêver, ça existe.
Papa m’ayant montré la Nuit du Chasseur quand j’étais en âge de vouloir fuir dans la foret, j’ai appris à rire en regardant « C’est arrivé prêt de chez vous », où pourtant, on a droit à une super fouine. Parce que c’est pas parce qu’un méchant est drôle que c’est pas une sale pute. La scène de viol dans le film sus-citée est proprement abominable.
On pourra se demander s’il y a là une typologie du méchant BELGE, puisqu’on retrouve une autre crevure en la personne de Claudie Faucan, Monsieur Faucan pour les intimes, Directeur commercial des abattoirs d’Anderlechte et photographe de charme amateur…
[Bande son de merde du demi-post]
Mais vous remarquerez comment je triche allègrement en parlant de plein de mecs alors qu’il faut en choisir trois.
C’est qu’en fait, mon cœur et mon orgueil sont dans la balance : d’abord parce que je ne sais plus qui, ensuite parce que les Roberts (oh oui !), Judiths et OG (sans oublier N et Flash–Aaahaaa! ) ont déjà pondu des choses talentueuses, piqués des méchants que j’aime bien, et enfin, parce que j’ai envie de trouver des méchants meilleurs que les autres, dans un pur instinct de compétition qui me pousse à vouloir écraser les autres et les réduire en esclavage, etc., comme dans tous ces Enzo Castelliari et autres westerns postapocalypse d’Italie et d’ailleurs (qui a crié «Pinoy ! » ?) et dont j’enrage grave de ne pas avoir retenu le nom, l’anecdote, le trait de cruauté.

« Le cuir banc Courreges, ça craint. Regarde-moi : que du Bernard Wilhlem ! La classe ! »
Pourtant, vas-y que je te crame au lance-flamme, te crible de flèches comme Saint-Sébastien et viole ta femme devant toi avant de renverser EXPRES l’eau que tu as mis 2 mois à collecter dans le désert. (Hein ?! )
Le schéma classique, quoi.
J’abdique à trouver le méchant de nanar trop obscur, vous avez qu’à regarder des Cynthia Rothrock tout seuls. Faites pas faire le sale boulot aux autres.

Le Révérend Robert Mitchum donc, avec ses menottes tatouées que je m’empressai de singer avec un feutre indélébile, son air rassurant, son boulot rassurant, son nom rassurant…
Un vrai méchant, impeccable, le roi de la violence froide, du cynisme qui transpire peu, du genre méthodique du crime, un peu comme Louis Jouvet qui aurait une indigestion de cassoulet : on voit qu’il y a un truc qui pointe derrière l’apparence, mais on sait pas quand ça va péter, et c’est ce qui fait peur.
Mais il est belle gueule le con, en plus. Pas revu depuis l’enfance, mais le traumatisme l’a imprimé comme méchant pour longtemps.
Sur le banc de touche, dans sa catégorie、on trouve ce sale bâtard de George Hearst, magnat de l’empire minier sévissant dans les saisons deux et trois de Deadwood. Froid, cynique, et en plus il se permet de faire le mariole…qu’est-ce qu’on rigole avec une balle dans la main, ahahah….
*Numéro 3 : le malade mental camouflé dans le quotidien.
Vous me demanderez,
Mais quelle différence avec le malade précédent ?
Excellente question.

Cernons le personnage : All About Lily Chou-Chou , c’est le quotidien malsain mais banal d’une certaine jeunesse nippone, celle qui enchaîne les uniformes, de collégien à salaryman, charpentier ou nettoyeur de rampe d’escalier…
Prenons donc une bande du premier stade. Désœuvrement, solitude. Humiliation. Solitude. Vengeances. Asservissement, viol, meurtre, suicide. Solitude. La routine.
Le méchant est là comme entité collective, oppressante, brutale parce qu’imprévisible et pourtant tellement prévisible, camoufle dans la tension, le malaise, l’absence de communication.
Mais cristallisé dans celui qui portera le couteau, celui qui plantera sa bite, celui qui tiendra le bras, celui qui branchera la tondeuse.

Le méchant, c’est l’arbre qui cache la forêt, celui sur qui se masse la mousse du bouillon malsain, mais les autres sont pires.
C’est le méchant quotidien, ponctuel, irréfléchi, qu’on excuserait volontiers par, l’accidentel, le Perdican, le Schultz, capable du mal ultime parce qu’il s’est fait embarquer, et que le mouvement a suivi.
Il était à Nuremberg par hasard, et soudain il s’appuie sur une crosse à Birkenhau. Il a servi à Nankin et vend des légumes dans ta rue.
Il est potentiellement partout, il a lapidé une kabajo dans un parc, il a violé, tué, crevé des yeux comme dans n’importe quel Murakami Ryu, et il est peut-être en train de lire par-dessus ton épaule.
C’est potentiellement une femme, un homme.
Et il rechapera à tout, sans doute, et sera plus normal que toi.

Mais ça manque un peu de glamour, tout ça…
Dans sa catégorie, Johan (Monster) est superbe, mais trop mégalo.
Donc on gardera plutôt le couple formé par « le Ténia » et le mec qu’on aperçoit au loin dans le couloir, pendant l’intenable viol (oui, je supporte mal…Cannibal Holocaust en mangeant une Bolognaise, ça va, mais le viol, je crains) d’Irréversible, l’un incarnant le mal qui se fait mais n’assume pas (il laisse un autre se faire transformer la tronche en steak hache, la classe) et l’autre, hum…la même chose, mais dans son côté passif (le mec qui mate et se barre).
Finissons avec un méchant qui a bercé mon enfance (contre un mur), Raoul, méchant de Ken le Survivant , éternel tortionnaire de gamine sur un canasson géant. Imbécile et jouissif.

« Monter un canasson ? Domestique ? Vivant ? Mais quelle horrrreurrrrr ?! »
[bande son de fin de post]
*On pourrait citer bien des avatars de ce méchant dans un nombre incalculable de films, qui hélas se ressemblent souvent tant que j’en ais oublie plein (j’ai du voir à peu près 80 des 250 films de la Shaw que j’ai, mais j’vous jure que ça fait déjà pas mal.)
Par exemple, le creveurs d’yeux à coup de fléchettes de Sword of Swords…
** on remarquera que dans le cinéma thaï, le méchant est AUSSI un handicapé, comme dans Ong Bak , par exemple. En italie aussi, comme dans l’excellent « Roma a mano armata« . Le cumul des mandats, une institution internationale.

« T’aurais pas un baumkuchen patate douce-matcha à dépanner ? »